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Sujet 13. Composition : « Le Moyen-Orient, un foyer de conflits depuis la fin de la Première Guerre mondiale »

22 Août 2017 , Rédigé par Laurent Boscher Publié dans #1. SUJETS CORRIGES

Sujet 13. Composition : « Le Moyen-Orient, un foyer de conflits depuis la fin de la Première Guerre mondiale »
INTRODUCTION

Présentation. Le Moyen-Orient, expression anglo-saxonne qui finit par supplanter l’expression française « Proche-Orient » à partir de 1945, désigne la région du monde située entre l’Egypte à l’Ouest, l’Iran à l’Est, la Turquie au Nord et l’Arabie saoudite au Sud. Au total, si l’on exclut l’Afghanistan et le Pakistan, que certains auteurs intègrent à cet espace, 16 pays font partie du Moyen-Orient. Cette région du monde, parfois surnommée l’« arc de crise », est, selon la formule consacrée, un foyer de conflits, au sens où c’est elle qui en ce début de XXIe siècle réunit le plus grand nombre de conflits.

Problématique. Pour quelles raisons le Moyen-Orient est-il un foyer de conflits depuis la fin de la Première Guerre mondiale ? Quels sont ces conflits ? Quels en sont les causes et les enjeux ?

Plan. Le Moyen-Orient est un foyer de conflits depuis la fin de la Première Guerre mondiale pour trois séries de raison : d’une part, les influences étrangères ; d’autre part, la naissance de l’Etat d’Israël ; enfin, ses divisions internes.

 

DEVELOPPEMENTS

[I] Le Moyen-Orient est fragilisé par les influences étrangères. Toujours, en effet, cette région du monde, et les pays qui la composent, ont été placés sous une influence étrangère : influence ottomane jusqu’en 1918 ; influence britannique et française jusqu’en 1945 ; influence américaine et soviétique, puis exclusivement américaine, depuis la Guerre froide jusqu’à nos jours.

[A] Jusqu’en 1918, le Moyen-Orient est dominé par l’Empire ottoman. Exception faite de la Perse, tous les pays de cet espace oriental dépendent de l’autorité du sultan ottoman, à la fois chef politique et religieux. A la fin de la Première Guerre mondiale, toutefois, l’Empire ottoman, allié de l’Allemagne, rangé du côté des vaincus, est démantelé. Les territoires arabes que celui-ci possédait jusqu’alors sont confiés, via un mandat de la SDN, à l’Angleterre et à la France. Seule l’Arabie échappe à ce partage. L’Empire ottoman, de son côté, est remplacé par une République laïque, créée par Mustafa Kemal, dit Atatürk. Celui-ci, favorable au modèle occidental, et opposé à l’influence politique de l’islam, abolit le califat dès 1924, rompant ainsi l’unité de la communauté musulmane, jusqu’alors rassemblée sous l’autorité religieuse du sultan ottoman (1517-1924).

[B] Entre 1918 et 1945, le Moyen-Orient est dominé par le Royaume-Uni et la France. Le Royaume-Uni et la France, en vertu du traité de Sèvres (1920), démantèlent l’Empire ottoman et donnent naissance à plusieurs pays. Au Royaume-Uni, qui domine déjà depuis le XIXe siècle l’Egypte et les émirats du golfe, sont confiés par la SDN : l’Irak, la Palestine et la Transjordanie, tandis qu’à la France est confiée la Syrie, aussitôt privée d’une petite partie de son territoire, le Liban, afin d’offrir aux chrétiens maronites, petits protégés des Français, un Etat distinct de la majorité musulmane. Les pays arabes, victimes des accords Sykes-Picot (1916), sont d’autant plus déçus par ce partage territorial que l’Angleterre et la France, pendant la Première Guerre mondiale, leur avaient promis l’indépendance, contrepartie de leur soutien militaire dans la guerre menée contre les Turcs de l’Empire ottoman. Les Arabes, auxquels avait été promis par les Britanniques la création d’un grand royaume arabe unifié, se sentent donc trahis.

[C] A partir de 1945, le Moyen-Orient est dominé par les Etats-Unis et l’URSS. Certes, au cours de la Guerre froide, les pays placés sous la tutelle des puissances coloniales accèdent tous à l’indépendance. Mais c’est pour retomber presque aussitôt dans la sphère d’influence de Washington et Moscou. Ainsi, alors que la Turquie, Israël, le Liban, l’Arabie saoudite, les monarchies du golfe Persique et le Yémen du Nord se rangent du côté des Etats-Unis, la Palestine, la Syrie et le Yémen du Sud se rangent du côté de l’URSS. D’autres, enfin, changent d’alliance : d’un côté, la Jordanie et l’Egypte, originellement alliées de l’URSS, passent dans le camp des Etats-Unis en 1970 et 1978 ; d’un autre côté, l’Irak, initialement alliée des Etats-Unis, bascule dans le camp de l’URSS en 1980. L’Iran, enfin, après avoir été l’alliée des Etats-Unis jusqu’en 1979 au temps du shah, réfute, depuis la révolution islamiste de l’ayatollah Khomeiny, tout compromis avec le monde occidental, américain aussi bien que soviétique. De nos jours, c’est-à-dire depuis la fin de la Guerre froide et le début du XXIe siècle, la majorité des pays du Moyen-Orient sont placés sous l’influence directe des Etats-Unis, l’Iran et la Syrie demeurant désormais les seuls véritables ennemis de la Maison Blanche.

[Transition] Depuis la Première Guerre mondiale jusqu’à nos jours, directement ou indirectement, le Moyen-Orient a donc toujours été placé sous influence étrangère : influence orientale, au temps de l’Empire ottoman ; influence occidentale, européenne ou américaine, au temps des puissances coloniales, de la Guerre froide et du nouvel ordre mondial. Au cours de la même période, cette région du monde, fragilisée par les influences étrangères, est encore un peu plus déstabilisée par la naissance de l’Etat d’Israël.

[II] Le Moyen-Orient est déstabilisé par la naissance de l’Etat d’Israël. Cette déstabilisation s’explique par trois séries de raison : l’implantation en terre musulmane d’un foyer de peuplement juif, au cours de la première moitié du XXe siècle ; le déclenchement de guerres israélo-arabes, entre 1948 et 1973 ; et la persistance de guerres israélo-palestiniennes depuis les années 1970 jusqu’à nos jours.

[A] Le projet sioniste, c’est-à-dire la volonté d’implanter un foyer de peuplement juif au Moyen-Orient, remonte au XIXe siècle. Au XIXe siècle, à l’initiative de Theodor Herzl, inquiet de l’antisémitisme qui se répand en Europe, un mouvement nationaliste est créé : le sionisme. Le sionisme, allusion à Sion, l’un des noms bibliques de Jérusalem, forme le projet de donner naissance à un foyer national juif, afin que le peuple juif dispersé depuis l’Antiquité puisse se rassembler derrière les frontières sécurisées d’un Etat qu’il dirigerait lui-même. Or, selon Herzl, cet Etat juif ne peut voir le jour ailleurs qu’autour de Jérusalem, alors située en Palestine, sous domination ottomane. En 1917, le ministre des Affaires étrangères britannique, Lord Balfour, est le premier dirigeant européen à soutenir « l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif » (déclaration Balfour). Il faudra cependant attendre 1947, au lendemain de la Shoah et de la création de l’ONU, pour que l’Etat d’Israël voie officiellement le jour. Le 29 novembre 1947, par la résolution 181, l’ONU met fin au mandat britannique et établit un plan de partage de la Palestine, qui donne 55% du territoire aux Juifs et 45% aux Palestiniens. Six mois plus tard, le 14 mai 1948, David Ben Gourion, chef du Yishouv, proclame la naissance de l’Etat d’Israël. Les Arabes, hostiles à la création d’une nation juive en terre musulmane, déclarent aussitôt la guerre au tout jeune Etat hébreu.

[B] Quatre guerres israélo-arabes, opposant l’Etat d’Israël à ses voisins arabes, surviennent entre 1948 et 1973. En premier lieu, la guerre d’indépendance (1948-1949). Elle oppose l’Etat d’Israël à cinq de ses voisins arabes (Egypte, Irak, Syrie, Liban, Jordanie). Cette première guerre, remportée par Tsahal, provoque deux conséquences : d’abord, l’agrandissement du territoire contrôlé par les Israéliens ; ensuite, l’immigration en Israël de nombreux Juifs chassés des pays arabes et, à l’inverse, l’exil de nombreux Palestiniens vers des terres arabes frontalières. En second lieu, la crise du canal de Suez (1956). Elle oppose Israël, soutenu par le Royaume-Uni et la France, à l’un de ses voisins arabes : l’Egypte, dirigée par Nasser, à l’origine de menaces répétées envers Israël et aussi de la nationalisation de la compagnie franco-britannique du canal de Suez. La victoire a beau être totale pour Israël et ses alliés, cette expédition punitive n’en est pas moins condamnée par les Etats-Unis et l’URSS, seuls maîtres du monde bipolaire de la Guerre froide. En troisième lieu, la guerre des Six-Jours (1967). Elle oppose Israël à trois de ses voisins arabes (Egypte, Syrie, Jordanie). Israël, victorieux, occupe désormais le désert du Sinaï, la bande de Gaza, le plateau du Golan ainsi que la Cisjordanie, dont Jérusalem-Est. L’ONU, par sa résolution 242, a beau exiger d’Israël le retrait des territoires occupés et des pays arabes la reconnaissance de l’Etat hébreu, la situation se fige. En quatrième et dernier lieu, la guerre du Kippour (1973). Elle oppose Israël à deux de ses voisins arabes (Egypte, Syrie). Pour la première fois, les pays arabes, sans être vainqueurs, ne sortent pas vaincus du conflit. Bien plus : les pays arabes de l’OPEP, hostiles à Israël ainsi qu’à ses alliés occidentaux, décident, en guise de solidarité, de multiplier par quatre le prix du cours du pétrole, provoquant ainsi le premier choc pétrolier (1973). Cette guerre du Kippour est la dernière des guerres israélo-arabes. Les pays arabes, lassés de s’investir dans un conflit sans issue, rattrapés eux-mêmes par leurs propres difficultés intérieures, abandonnent les Palestiniens à leur sort.

[C] Les guerres israélo-palestiniennes, opposant l’Etat d’Israël à des mouvements politiques palestiniens, prennent le relais des guerres israélo-arabes, à l’aube des années 1970. Le premier mouvement palestinien à combattre Israël les armes à la main est l’OLP, dirigée par Yasser Arafat. Fondée en 1964, l’OLP, simple organisation politique à l’origine, se transforme en mouvement paramilitaire en 1969 et recourt à l’arme du terrorisme à compter des années 1970. Ceux qui participent à de telles opérations se font appeler fédayins et appartiennent à des sous-groupes de l’OLP, tels le Fatah, le FPLP ou encore Septembre Noir. C’est à eux que l’on doit quelques-uns des attentats les plus médiatisés au cours des années 1970-1980, dont la prise d’otages aux Jeux Olympiques de Munich (1972), le détournement d’un avion sur Entebbe (1976) ou encore l’attentat de la rue des Rosiers à Paris (1982). En 1988, l’OLP a beau renoncer officiellement au terrorisme, une autre organisation palestinienne, le Hamas, fondé en 1987, prend le relais et multiplie les attentats-suicides sur le sol israélien. Un temps, néanmoins, au moment de la signature des accords de paix d’Oslo en 1993-1995, beaucoup croient la paix venue. En réalité, ces accords, dénoncés par les plus radicaux des deux camps, n’ont jamais été suivis d’effet. Les tensions entre Israéliens et Palestiniens se poursuivent à échéances plus ou moins rapprochées. Aujourd’hui, plus personne ne croit vraiment en la perspective d’une paix imminente.

[Transition] La naissance de l’Etat d’Israël, pour autant, si elle a certes contribué à déstabiliser un peu plus cette poudrière qu’est le Moyen-Orient, ne saurait à elle seule expliquer la récurrence des conflits qui se jouent dans cette région du monde. Le conflit entre juifs et musulmans, en effet, est bien peu de chose au regard des conflits opposant les musulmans entre eux.

[III] Le Moyen-Orient est marqué par ses divisions internes. Rien, en effet, n’est plus faux que d’imaginer, face à l’Etat d’Israël ou au monde occidental, un monde musulman uni. Le monde musulman, loin d’être un espace homogène, est, au contraire, un espace hétérogène au sein duquel les divisions sont à la fois d’ordre culturel, politique et économique.

[A] Le Moyen-Orient est divisé sur le plan culturel. Trois grandes civilisations cohabitent au Moyen-Orient : celle des Arabes ; celle des Perses, aussi appelés Iraniens ; et celle des Turcs, autrefois maîtres de l’Empire ottoman. Au cours de l’histoire, Arabes, Perses et Turcs ont successivement imposé leur domination sur la région. Aujourd’hui, encore, des rivalités subsistent entre ces trois pôles, toujours soucieux d’élargir leur influence et de dominer le Moyen-Orient (cf. la guerre Iran-Irak, 1980-1988). Ces trois civilisations majoritaires, cependant, ne sont pas les seules. Deux autres, minoritaires, existent également : naturellement, celle des Juifs, que nous venons d’évoquer ; ainsi que celle des Kurdes, un peuple sans Etat, réparti entre quatre pays (Turquie, Irak, Iran, Syrie), lesquels pratiquent à leurs dépens discriminations et persécutions. Sur le plan religieux, trois confessions cohabitent également au Moyen-Orient : d’abord, l’islam, lui-même divisé entre sunnites et chiites ; ensuite, le christianisme, lui-même divisé entre différents rites (maronites, coptes, chaldéens, syriaques) ; enfin, le judaïsme, lui aussi divisé en son sein entre laïcs et orthodoxes ainsi qu’entre Ashkénazes et Séfarades.

[B] Le Moyen-Orient est également divisé sur le plan politique. Certains pays sont des Etats laïques, d’inspiration occidentale, à l’intérieur desquels la loi politique domine la loi religieuse (Turquie de Mustafa Kemal, Iran du shah, Egypte de Nasser, Palestine d’Arafat, Irak de Saddam Hussein, Syrie de Bachar el-Assad). A l’inverse, d’autres Etats sont d’inspiration islamiste (Arabie saoudite, monarchies du golfe Persique, Iran depuis 1979). Dans tous les cas, cependant, qu’il s’agisse d’Etats laïques ou de théocraties religieuses, ces régimes s’apparentent moins à des démocraties qu’à des dictatures. Depuis les indépendances, du reste, les Etats laïques sont les plus nombreux. Mais, en raison de leur échec sur le plan politique et économique, des mouvements démocratiques et islamistes contestent de plus en plus ouvertement leur légitimité, comme en témoigne l’épisode des printemps arabes apparu à partir de 2010. En tout cas, jamais, depuis les décolonisations, l’islamisme, longtemps réprimé par les pays musulmans eux-mêmes, n’a semblé si près d’accéder au pouvoir : soit pacifiquement, à l’image de l’AKP d’Erdogan, au pouvoir en Turquie depuis 2003 ; soit par la violence, à l’image du groupe terroriste Daech (ex Al-Qaïda), en Irak et en Syrie.

[C] Le Moyen-Orient, enfin, est divisé sur le plan économique. Certains Etats font des hydrocarbures le ressort de leurs économies nationales (Arabie saoudite, Iran, Irak, pays du Golfe), tandis que d’autres, moins bien lotis, rencontrent davantage de difficultés pour assurer leur développement (Egypte, Syrie, Turquie). Voilà du reste pourquoi certains grands pays pauvres, tels l’Irak et la Syrie, nourrissent le projet de rattacher à leurs territoires de petits pays riches, tels le Koweït et le Liban, dont ils estiment avoir été injustement dépossédés par les puissances coloniales européennes durant l’entre-deux-guerres. Ni la guerre du Liban (1975-1990), toutefois, ni l’invasion du Koweït (1990), qui a donné lieu à la guerre du Golfe (1991), n’ont respectivement permis d’assouvir les ambitions territoriales de la Syrie et de l’Irak. Ces deux mêmes pays, d’ailleurs, sont également en conflit avec leurs voisins d’Israël et de Turquie. La Syrie accuse Israël de s’approprier les réserves en eau du Jourdain et du plateau du Golan, tandis que l’Irak reproche à la Turquie de retenir au moyen de ses barrages les eaux du Tigre et de l’Euphrate. Dans un milieu naturel hostile, globalement aride, où l’eau est rare et la pression démographique forte, la question de l’accès aux ressources constitue ainsi une dernière source de tension. De fait, craignent les observateurs les plus alarmistes, aux guerres pour « l’or noir » pourraient succéder les guerres pour « l’or bleu ».

 

CONCLUSION

Fermeture. Le Moyen-Orient est donc bel et bien un foyer de conflits, au sens où depuis la fin de la Première Guerre mondiale il est la région la plus instable de la planète. L’origine des conflits qui s’y joue est parfois très ancienne, souvent très complexe et toujours multifactorielle. Les influences étrangères, la naissance de l’Etat d’Israël et les divisions intestines inhérentes au monde musulman font de cet espace une véritable poudrière, toujours prête à s’embraser à la moindre étincelle.

Ouverture. L’ancrage au Moyen-Orient de la plupart des conflits du monde est-elle une fatalité ? L’avènement de la démocratie et, dans son sillage, celui du développement, ne pourraient-ils au XXIe siècle, comme en Europe, en Amérique puis en Asie au XXe siècle, contribuer à la naissance d’un Moyen-Orient enfin pacifié et prospère ?

 

PLAN

 

I - Une région fragilisée par les influences étrangères

A - Une région dominée par l’Empire ottoman jusqu’en 1918

B - Une région dominée par le Royaume-Uni et la France entre 1918 et 1945

C - Une région dominée par les Etats-Unis et l’URSS, puis les Etats-Unis seuls

II - Une région déstabilisée par la naissance de l’Etat d’Israël

A - Le projet sioniste

B - Les guerres israélo-arabes

C - Les guerres israélo-palestiniennes

III - Une région marquée par ses divisions internes

A - Les rivalités culturelles

B - Les rivalités politiques

C - Les rivalités économiques

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